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LES ABSTENTIONS LORS D’UN VOTE EN ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Chronique rédigée par :

Genevieve

Me Marie Diane Ngom

Conseillère juridique

Cooper Daniel

Me Daniel Cooper

Conseiller juridique principal

La gouvernance démocratique est l’un des six principes de l’économie sociale1 et représente un des piliers des entreprises collectives. En effet, l’entreprise collective est créée pour répondre aux besoins de ses membres et ce sont ces derniers qui prennent part de manière démocratique à sa gouvernance. En général, l’expression pratique de cette gouvernance démocratique est « un membre = un vote »2. Ainsi, lors des assemblées générales annuelles ou extraordinaires des membres, ceux-ci sont souvent appelés à exprimer leur vote sur une question donnée. Lors d’un vote, le membre de l’entreprise collective peut être soit pour, soit contre, ou s’abstenir. Si l’expression positive ou négative d’un vote ne pose pas de questions particulières, la situation est toute autre en ce qui concerne l’abstention et son impact sur l’adoption de la décision qui fait l’objet du vote.  La présente chronique a pour objet de clarifier la portée d’une abstention lors d’un vote et d’attirer par le fait même, l’attention des membres des entreprises collectives sur les conséquences de cette abstention.

  1. La signification de l’abstention lors d’un vote en assemblée générale

L’abstention est le fait de ne pas voter lors d’un scrutin au sein d’une assemblée3. Elle constitue donc un refus de prendre part à un vote et n’est pas un vote négatif. S’abstenir de voter, c’est donc de refuser d’exprimer sa voix et non de voter négativement.

  1. L’abstention peut-elle être comptabilisée lors d’un vote en assemblée générale?

La réponse à cette question est négative. En effet, l’abstention est un refus de voter. Ainsi, lorsqu’un membre refuse de voter, ce refus ne sera pas comptabilisé, aux fins de savoir si la décision, objet du vote est adoptée. La règle suivante du Guide de procédure des assemblées délibérantes est très claire sur ce point : « (…)

Une abstention est un refus de se prononcer et non un vote négatif. On ne tient pas compte des abstentions dans le calcul de la majorité. »4(Notre emphase.)

Seules les voix exprimées seront donc prises en compte, même s’il ne s’agit que d’une minorité.

Dans son ouvrage Les assemblées délibérantes dans les coopératives, M. Claude Béland souligne cet état de choses lorsqu’il mentionne que : « Lorsque, malgré la demande du président, l’assemblée refuse d’exprimer un vote, la proposition est rejetée. Cette règle ne s’applique cependant que lorsqu’aucun vote n’est exprimé. Si la majorité des participants s’abstiennent de voter, ils doivent en subir les conséquences. On tient alors compte uniquement des voix exprimées, même s’il s’agit des voix d’une minorité.

Cette minorité, cependant, doit être au moins égale au nombre de participants requis pour que le quorum soit atteint. (…) »5. (Notre emphase.)

C’est donc dire que lors d’un vote, la majorité pour l’adoption d’une décision est atteinte lorsque le nombre de participants requis pour le quorum a voté.  Ainsi, lorsqu’un membre ne participe pas au processus démocratique en s’abstenant, il n’est pas compté dans l’atteinte du quorum. Seuls les membres participants au vote seront pris en compte dans l’établissement du quorum pour ce vote.  

Dans la Loi sur les coopératives, le quorum par défaut pour l’assemblée des membres est le nombre de personnes présentes6. Rappelons que s’abstenir équivaut à un refus de voter et donc à un refus de participer. Ainsi, si un seul membre participe au vote de façon positive et que le reste des membres s’abstiennent de voter, la décision sera considérée être prise à l’unanimité, car ce seul membre en constituera le quorum requis. Telle situation peut s’avérer très embarrassante lorsque certains membres, bien qu’étant en désaccord avec la décision soumise au vote, s’abstiennent de voter et constatent par la suite l’adoption de cette décision. Pour éviter des problèmes qui pourraient survenir dans ce cas, nous suggérons aux entreprises collectives d’inviter leurs membres à exprimer leur volonté de façon positive ou négative à l’occasion d’un vote lors d’une assemblée générale, tout en leur mentionnant l’impact d’une abstention sur le processus démocratique.  

À retenir :

  • L’abstention de voter équivaut à un refus de voter.
  • Les abstentions ne sont pas comptabilisées lors d’un vote.
  • Un membre qui n’est pas en accord avec la décision soumise au vote devrait voter négativement au lieu de s’abstenir.

    N’hésitez pas à contacter un expert juridique du Consortium si vous avez des questions en lien avec le contenu de cette chronique.

    1 Article 3 de la Loi sur l’économie sociale, RLRQ c E-1.1.1. À titre informatif, les cinq autres principes de l’économie sociale sont : l’obligation de répondre aux besoins des membres, une autonomie de gestion face à l’État, une viabilité économique recherchée, une interdiction de la distribution de surplus ou une distribution qui ne doit pas enrichir les membres et une pérennité assurée.

    2 En considération de certains facteurs, il peut arriver qu’un membre d’une organisation détienne plusieurs votes. C’est notamment le cas pour les fédérations de coopératives qui peuvent par règlement, moduler le nombre de votes de ses membres. À cet effet, voir l’article 236 de la Loi sur les coopératives, chapitre C-67.2.

    3 Hubert Reid, Simon Reid (avec la collaboration), Dictionnaire de droit québécois et canadien, 6e éd., Wilson & Lafleur, 2023, v° (« abstention »).

    4 Guide de procédure des assemblées délibérantes, 4ième édition révisée, 2001, PUL (Université de Montréal, secrétariat général), règle n°96.

    5 BÉLAND, C., Les assemblées délibérantes dans les coopératives, Montréal, Québec Amérique, 1989, par. 181.

    6 Art. 64 de la Loi sur les coopératives, RLRQ c C-67.2. Il est à noter que l’entreprise collective peut modifier ce quorum dans ses règlements. D’ailleurs, pour les entreprises collectives constituées en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies, chapitre C-38, ce sont les administrateurs qui déterminent par règlement, le quorum des assemblées générales des membres : art. 91 alinéa 2 e).

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